“Lettres d’Ogura”, une vie au ralenti

Hubert Delahaye observe dans ce récit le quotidien des derniers habitants d'un village rural où le temps n’est pas si figé qu’il n’y paraît.

19.07.2021

TexteClémence Leleu

© L'asiathèque

« Il n’y a pas de rue à Ogura, il n’y a que l’unique petite route qui se termine au fond de la vallée, au fond d’un interminable escalier de pierre. » Pourtant, c’est dans ce petit village niché au cœur d’un vallon au pied d’une montagne des environs de Kyoto que Hubert Delahaye a choisi d’installer son récit épistolaire. Une vingtaine de maisons, quelques habitants et surtout un art de vivre où le collectif et la connexion avec la nature sont des valeurs cardinales, voilà comment pourrait être décrit Ogura.

Hubert Delahaye est attaché à la chaire histoire sociale et intellectuelle de la Chine au Collège de France, mais aussi maître de conférences aux instituts d’Extrême-Orient. Lettres d’Ogura est son premier ouvrage consacré au Japon. 

 

Un hommage aux temps révolu et présent

Dans ce récit qui prend la forme de lettres mais sans aucun destinataire connu, l’auteur permet une immersion dans un Japon rural, où l’on serait tenté de dire que le temps s’est arrêté. Pourtant il n’en est rien. Le temps continue sa course, les jours qui se suivent sont autant d’occasions pour les habitants d’Ogura de perpétuer leurs rituels, de rendre hommage à la nature, aux disparus, et de contempler avec fascination le changement de saison. Si Ogura est essentiellement peuplé de personnes âgées, il serait réducteur de cantonner ce récit à une photographie d’un monde en train de disparaître avec ses derniers ambassadeurs.

Le rythme de vie y est certes plus lent et contemplatif que dans les aires urbaines, mais les préoccupations des habitants d’Ogura sont souvent identiques à celles de leurs concitoyens vivant en ville : changement climatique, entraide sociale, liens entre générations… Le pouls d’Ogura bat toujours, plus lentement qu’à son âge d’or lorsque le village était bien plus peuplé, mais il permet de donner à voir quelques merveilles de la nature et d’humanité, à côté desquelles un corps trop pressé risquerait de passer sans y prendre gare.

 

Lettres d’Ogura (2017), un livre de Hubert Delahaye publié aux éditions l’Asiathèque.