Otaru, itinéraires gourmands

Si l'île d'Hokkaido est connue pour ses paysages naturels et ses pistes de ski, elle l’est aussi pour l’étendue de sa palette alimentaire.

18.12.2020

TexteBenoit Piquet PhotographiesIkuya Sasaki

Otaru est une ville connue pour sa qualité de vie, ainsi que pour sa culture culinaire et la variété de ses restaurants. Du bar à vins au restaurant de sushi, de la brasserie artisanale à la trattoria de poche, Otaru est une fête pour qui sait s’y repérer et s’y régaler des mille et une saveurs qui y sont offertes. Balade gourmande dans les rues d’Otaru.

De l’étage nous arrivent les échos de conversations enjouées et de verres qui s’entrechoquent, des rires aussi, des éclats de voix joyeux qui disent alcool et camaraderie. Nous sommes à Sakesho Takano, en apparence un magasin de sake comme tant d’autres, sis dans un des passages couverts du centre-ville. Passé 20 heures, l’enseigne lumineuse de la boutique est la seule trace de vie ou presque à la ronde. Otaru a l’habitude des hivers rigoureux et des couchers précoces. Sur les étagères, les bouteilles s’alignent comme au garde-à-vous, les Junmai daiginjo côtoient les Junmai ginjo, les liqueurs font copain copain avec les bières artisanales et les vins d’ici – Yoichi n’est pas bien loin, mais de cela nous reparlerons bientôt – ou d’ailleurs. Au fond de la boutique, c’est par un escalier étroit que l’on se hisse à l’étage jusqu’au royaume de Takano-san, le maître des lieux, les cheveux blancs depuis belle lurette mais toujours une énergie du diable. À la carte, quelques plats simples accompagnent benoîtement des verres beaucoup moins sages. À coup de tickets, comme à la foire ou à la fête foraine, on se ravitaille en nectars plus ou moins corsés et l’on fait connaissance avec ses voisins. Surprise, l’un des convives du soir est francophone. La fête n’en sera que plus belle.

Si l’île est connue pour la beauté de ses paysages naturels et la qualité de ses pistes de ski, Niseko en tête, Hokkaido l’est aussi pour l’étendue de sa palette alimentaire : outre les algues konbu et autres produits de la mer, on trouve ici fruits et légumes, viande – de mouton notamment – et spécialités laitières, glaces et fromages compris. Hokkaido est dit-on le grenier de l’archipel. C’est aussi sa meilleure cave, puisque l’on trouve à Hokkaido aussi bien des whiskys d’exception que des bières artisanales et des vins nature parmi les meilleurs du pays. À tous ces délices, Otaru constitue la parfaite introduction, et nous avons le photographe et moi 48 heures pour nous en laisser convaincre. De nos deux jours sur place, nous aurons d’abord appris que l’idée selon laquelle les sushi sont ici un ton au-dessus n’est pas que vantardise et discours promotionnel. Appris ensuite que la ville a la table volontiers conviviale et joyeuse. Un exemple ? Rakuten, bistrot pur jus du centre de la ville. Ici, le convive est invité à se faufiler jusqu’en cuisine ou presque pour choisir lui-même son vin dans le cellier. Attention danger.

Trois heures plus tard, nous fermions le ban au bar à whisky Rita, à une dizaine de minutes de là. Le lieu emprunte son nom à l’épouse britannique du fondateur de Nikka Whisky, Masataka Taketsuru, que beaucoup considèrent comme le père du whisky japonais. Du single malt 25 ans au très exclusif single cask Genshi, les amoureux de whisky trouveront à coup sûr leur bonheur au comptoir de ce speakeasy d’exception.

©︎Pascal Viout

Rebelote le lendemain avec un coup de maître, encore un, le bien nommé Barilotto, « le tonneau », notre cerise sur le gâteau, la surprise que l’on n’attendait pas. Pensez, un restaurant de poche, cinq ou six places à tout casser, au comptoir uniquement, perdu au bout d’une de ces ruelles dites yokocho aux néons d’un autre temps dont le Japon a le secret. On ne l’avait pas vu venir et on a été bluffé. Occupé à faire mille choses à la fois dans sa micro cuisine, le tire-bouchon dans une main, la spatule dans l’autre, Takeru Touma débouche les bouteilles et les petits plats maison comme on dirait « ouf » et il fait mouche à chaque fois. Et puis il y a les vins, et quels vins ! De ceux dont la vue des étiquettes à elle seule rendraient jaloux les plus connaisseurs.

Plus sage et plus spacieux, Otaru Bine marie vins de Hokkaido et spécialités locales dans un décor simple et élégant, reposant. Parfait pour s’initier à la cuisine locale et à ses diffrents cépages, avec une mention particulière pour les pizzas maison, la spécialité du chef nous dit-on.

Une dernière adresse pour la route ? Otaru Beer, dont le vaste restaurant est logé dans un ancien entrepôt le long du canal, avec une terrasse en bonus. À l’heure où le jour tombe, un bonheur rare de ce côté du globe. Nous y sommes reçus par Brian Dishman, le gérant américain de cette brasserie… allemande. Outre des plats de fromage ou de viande, le Schweinebraten par exemple, une sorte de porc rôti servi avec des pommes de terre, on trouve à Otaru Beer tout un choix de bières plus goûteuses les unes que les autres. La plus populaire ? La Pilsner, une bière douce et savoureuse, idéale pour la saison. Patron, la même chose !