Des cimetières saisissants d’éclat
Sa formation en géographie a renouvellé la conception picturale du paysage. Ainsi, depuis 1991, il prend des photos vues du ciel dans toutes sortes d’endroits du monde, investi d’une quête infinie dont le but est de prélever des échantillons de la surface de la terre. Grâce à sa constance, sa ténacité, et son ingéniosité, Matsue a bâti une collection phénoménale. Son travail est à la fois conçu pour embrasser des vues panoramiques et des gros plans très nets. Si proches qu’on pourrait presque les toucher. Sa technique intègre harmonieusement les aspects naturels de la terre et ceux issus de la main de l’homme, ouvrant la voie à un nouveau domaine de l’histoire naturelle qui se rapproche d’une véritable encyclopédie de la terre.
En 2015, Matsue publie LIM, sorte de tour du monde des cimetières sous la forme d’un recueil photographique – des sépultures comme abandonnées, mais aussi des cimetières somptueux et colorés, à la luminosité pénétrante. S’ils sont définis par la culture et le climat, certains ont parfois l’apparence de petites ères de repos.
'ANF 0004', 2015, Type-C print, 285 x 357 x 43 mm with frame
Cimetières à Antofagasta, au Chili, vus depuis les hauteurs. La série conprend également de nombreuses prises de vue effectuées depuis des hélicopters et des petits avions. « C'est parce que dans certains pays, les cimetières sont souvent entourés de clôtures », commente Matsue. Il a en effet constaté que par-delà les religions et les cultures, il existe une pratique universelle qui consiste, pour les êtres humains, à jeter un voile sur ce que l'on nomme « l'autre côté », et à éviter de regarder l'au-delà dans leur quotidien. ©TAIJI MATSUE Courtesy of TARO NASU
« Depuis lépoque de mes études, les cimetières sont un thème récurent et le choisi les sites selon mes propres critères. Et en réalité, le décor idéal est quelque chose de rare. »
Pour écarter toute spiritualité des images et éviter ainsi ce qu’il considère comme un lieu commun, Matsue a limité ses heures de travail à des moments où le soleil se répand uniformément sur l’ensemble des objets. Les ombres et la ligne d’horizon semblent s’effacer. La texture de chaque élément s’anime. Il s’agit là de la méthode Matsue, qui offre une information visuelle exhaustive, comme perçue du point de vue d’un microscope. Ses photos communiquent un sentiment d’universalité dont on ne se lasse pas. Le travail de Taiji Matsue pourrait bien entrer dans la catégorie de l’art conceptuel du 21ème siècle.
'LIM 34942', 2015, Type-C print, 285 x 357 x 43 mm with frame
Cimetière à Lima, Pérou. Photo prise à hauteur d'homme. « Comme l'espace est étroit et que les angles de vue sont limités, je prends souvent des photos de très près pour ce genre d'endroits. » L'information visuelle dépeint avec force le concept latino-américain de communauté. ©TAIJI MATSUE Courtesy of TARO NASU
'RAK 121495', 2015, Type-C print, 285 x 357 x 43 mm with frame
Marrakech, Maroc. Avec son paysage aride et ses stèles clairsemées, ce cliché donne une image inédite de la vie après la mort. Les tombes volumineuses qui attestent de l'autorité des puissants se trouvent le plus souvent dans les zones urbaines. Néanmoins, dans certains endroits, des personalités importantes ont été enterrées sur un pied d'égalité avec le commun des mortels. ©TAIJI MATSUE Courtesy of TARO NASU
©Taiji Matsue
Taiji Matsue
Né à Tokyo en 1963, Taiji Matsue a étudié à l'université de Tokyo et obtenu un diplôme de géographie. Il a reçu le New Photographer Award du 12ème Festival International de Photo de Higashikawa en 1996 et le 27ème Kimura Ihei Award en 2002. Parmi ses séries les plus marquantes, se distingue celle intitulée LIM (2015, Seigensha Art Publishing). En février 2017, Matsue publie Hashima, un recueil de photos concernant l'île abandonnée de Hashima (communémént appelée Gunkanjima, qui en japonais signifie L'île du Combat).
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