La Flower Box de Nicolai Bergmann fête ses 20 ans
©Robert Kirsch
Des torii du sanctuaire Daizaifu Tenmangu de Fukuoka aux marches du temple Kiyomizu de Kyoto, en passant par les chantiers de construction de Tokyo, Nicolai Bergmann orne les rues du Japon de ses motifs floraux depuis deux décennies. À l’approche des célébrations du vingtième anniversaire de l’oeuvre qui a marqué le début de sa carrière – l’innovante Flower Box ou « boîte à fleurs » – Bergmann nous a parlé de ses premiers rêves de devenir fleuriste et de certaines des entreprises les plus originales dans lesquelles il s’est lancé.
Enfant, à Copenhague, Nicolai Bergmann était entouré par la nature, des plantations de pommiers de ses grands-parents à l’entreprise de son père et aux fermes exploitées par ses proches. Mis à part un bref intermède où il a eu l’intention de suivre les traces de ses parents agriculteurs – une carrière qui, en fin de compte, ne lui a pas apporté beaucoup de joie – le rêve de Bergmann n’a jamais faibli : avoir son propre magasin de fleurs. Adolescent, Bergmann a parcouru le monde avec l’entreprise de son père. Il a fait ses premiers pas sur le sol japonais à l’âge de 19 ans. Bien qu’impressionné au départ par la taille de l’horizon urbain japonais, il ne s’est rendu compte du potentiel et de l’énergie du Japon qu’à son retour au Danemark, un pays à l’altitude relativement peu élevée. Il n’a fallu que neuf mois avant que Bergmann ne retourne au pays du soleil levant.
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Le succès au Japon est venu à Bergmann d’une manière assez peu courante. Il y a vingt ans, alors qu’il venait d’ouvrir sa première boutique dans l’archipel, un client vient le trouver avec une commande ambitieuse et intrigante : produire 600 cadeaux floraux pour un événement, les 600 bouquets devant tenir sur une seule table. Le tout, avec un budget limité et un espace qui l’est encore plus. N’hésitant pas à relever le défi, Bergmann commence à expérimenter des designs jusqu’à ce qu’il ait l’idée de boîtes à couvercle, permettant d’empiler les fleurs avec soin. Enthousiasmé par sa trouvaille, il en constitue alors de nombreux échantillons, avant de se rendre compte que le client a trouvé autre chose. Malgré cette déception, les boîtes à fleurs, exposées de manière imposante dans le magasin qui lui avait été confié, commencent à susciter beaucoup d’intérêt. « Qu’est-ce que c’est ? Comment l’utiliser ? » Ce genre de questions met la puce à l’oreille de Bergmann et laisse entrevoir un succès potentiel de ce qu’il appelle Flower Box. Le concept ne tarde d’ailleurs pas à attirer l’attention des acheteurs de la boutique de premier plan « ESTNATION », alors sur le point d’ouvrir son premier magasin. A l’ouverture de ce dernier, il est donc décidé qu’il portera le nom de la marque Nicolai Bergmann Flowers & Design. C’est le début du succès de la Flower Box qui explose alors sur le marché japonais. Aujourd’hui, la Flower Box compte plus de 1,5 million de hashtags sur Instagram.
Bergmann décrit l’essence de son style comme une fusion entre le Danemark et le Japon. Bien que toute sa carrière ait été basée au Japon, il admire les « lignes pures » du Danemark et cite l’architecte danois Arne Jacobsen et le designer de meubles Carl Hansen comme sources d’inspiration. Bergmann reconnaît également que son statut d’étranger, combiné à sa réputation, lui a permis d’accéder à des endroits où d’autres personnes auraient pu être refusées. Un parfait exemple de ceci est son exposition biennale au sanctuaire Daizaifu Tenmangu à Fukuoka. Nicolai a établi une relation de confiance avec le prêtre du sanctuaire grâce à plusieurs expositions, et en conséquence, il a obtenu l’autorisation dès le jour de sa demande d’envelopper entièrement de roses les torii de 50 m du sanctuaire. Le prêtre de Tenmangu « est devenu comme un membre de la famille » pour Bergmann qui sait qu’il le retrouve à l’aéroport à chacune de ses visites. Il est difficile d’imaginer que quelqu’un d’autre puisse être accueilli avec autant de chaleur dans un lieu si sacré.
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Tout en s’efforçant toujours de réitérer le succès de la Flower Box, Bergmann concède qu’un tel exploit se reproduit rarement dans une vie et il concentre désormais son énergie sur des projets de grande envergure. Un parc floral à Hakone, dont l’ouverture est prévue en 2021, est actuellement en cours de développement. « Ce sera un endroit très simple, où vous pourrez simplement profiter de la nature. » Les visiteurs peuvent s’attendre à un parc chic, de près de quatre hectares, avec des pièces de land art que Bergmann a réalisées à partir de matériaux naturels. Ces objets proviendront de divers endroits du Japon. Bergmann utilisera notamment des pierres provenant d’un projet qu’il a réalisé à Fukushima, en construisant une cour de récréation pour les enfants d’une école durement touchée par le tremblement de terre du 11 mars 2011, ainsi que des arbres et des plantes provenant du site de sa nouvelle galerie à Omotesando. En fait, il s’agira d’un projet national, rassemblé en un seul endroit.
En l’honneur du 20e anniversaire de la Flower Box de Bergmann, trois expositions, chacune d’une durée de plusieurs jours, seront organisées dans différents endroits du pays. En commençant par Roppongi Hills à Tokyo en novembre, les célébrations se poursuivront au sanctuaire Daizaifu Tenmangu de Fukuoka et au temple Kiyomizu de Kyoto l’année prochaine. Les expositions comprendront des archives des œuvres de Bergmann, des installations numériques, des collaborations avec différents artistes et, bien sûr, la Flower Box – les visiteurs auront même la possibilité de créer leur propre boîte. En s’essayant à ce processus délicat, on pourrait parvenir à saisir les difficultés auxquelles Bergmann a dû faire face en lançant son entreprise à partir de rien. Mais, comme Bergmann l’affirme lui-même, si votre vision est facile à mettre en œuvre, elle ne vaut pas la peine d’être poursuivie. « Ce que je voudrais vraiment exprimer, c’est que si vous avez du dynamisme et de la créativité dans n’importe quel domaine, il n’y a pas de limite aux possibilités qui s’offrent à vous. J’ai commencé ma vie en tant que fleuriste, mais je fais tellement d’autres choses maintenant… il y a des possibilités infinies si vous vous dévouez à ce que vous faites. »
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