Buaisou, la ferme japonaise qui cultive l’indigo dans les règles de l’art
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
Si la teinture de l’indigo se cultive depuis le XIXème siècle au Japon, ce n’est qu’au début du XXème siècle qu’elle se popularise véritablement. Et ce, notamment au sein de la préfecture de Tokushima, à 600 kilomètres de Tokyo, sur l’île de Shikoku. À l’époque, on comptait près de 2000 agriculteurs spécialisés dans l’indigo contre seulement cinq aujourd’hui. Parmi eux, Buaisou, un collectif d’agriculteurs-artisans japonais, qui s’est donné pour mission de préserver l’art ancestral de la teinture bleu indigo.
C’est en 2015 que Buaisou voit le jour. Son créateur, Kakuo Kaji, remporte un appel d’offre du Ministère de l’Education japonais qui propose d’accompagner deux personnes dans leur apprentissage du métier d’agriculteur spécialisé dans l’indigo. Le but : pérenniser cet art avant qu’il ne soit perdu. C’est le début de Buaisou qui se définit comme étant un collectif de fermiers et teinturiers participant à toutes les étapes nécessaires pour créer ce bleu universel.
“Tous les processus initialement répartis dans différentes exploitations sont exécutés au sein-même de Buaisou : la culture de l’indigo brut, la fermentation des feuilles d’indigo, la teinture, la création et la production”, souligne Kaji.
L'indigo, un art à part entière ancré dans la culture japonaise
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
Ce dernier nous explique s’être intéressé à la teinture de l’indigo dès l’âge de 17 ans. “Au cours de mes études de design textile à l’université de Zokei, j’ai découvert toutes les étapes minutieuses que nécessite la teinture indigo. C’est à ce moment là que je suis tombé amoureux de tout son procédé, et de la patience que celui-ci requiert. Il reste unique lorsqu’on compare les autres formes de teintures car il prend beaucoup plus de temps. C’est un art à part entière, ancré dans la culture japonaise”, poursuit-il.
Aujourd’hui, Buaisou est porté par six personnes (cinq artisans-teinturiers et Kaji, le responsable de l’équipe). “C’est avant tout le souhait de créer la couleur par nous-mêmes”, explique Kaji. “Dans la mesure du possible, tout est fait dans notre ferme”, ajoute-t-il.
Un travail de longue haleine qui peut demander plus d’un an et demi de suivi. Et pour cause : “Rien qu’en partant de la plantation des graines jusqu’à la fin du compostage des feuilles indigo pour ensuite créer la teinture – que l’on appelle “Sukumo” – cela prend un an. Ensuite, nous devons faire sécher notre fameux colorant Sukumo, et cela peut nécessiter jusqu’à 6 mois d’attente”, précise Kaji.
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
Une approche complète et unique dévouée à la teinture indigo, qui passionne à travers le monde. Buaisou organise ainsi à l’international des workshops auprès d’artistes, designers, professeurs, étudiants, touristes ou encore célébrités telles que Kanye West. “La plupart des gens ne savent pas comment cultiver l’indigo et encore moins toutes les formes qu’il peut prendre : pâte ou poudre, naturel ou synthétique. Donc aujourd’hui, l’une de nos missions principales avec Buaisou c’est également de démocratiser notre savoir en organisant tous ces ateliers”, commente Kaji. Des workshops dans lesquels on réalise de la teinture indigo à partir uniquement de feuilles d’indigo, de soude, de son et de calcaire. Pour en tirer un pigment naturel qui se transforme par la suite en véritable oeuvre d’art.
Fort de son succès, depuis 2018 Buaisou fabrique ses propres jeans teints à la main. “La prochaine étape est de cultiver notre propre coton et de le tisser nous-même”, nous confie Kaji. Dans l’espoir de faire mieux connaître la teinture bleu indigo à la japonaise et d’en moderniser l’approche, afin qu’elle séduise les générations suivantes.
Pour plus d’infmorations et pour participer à un atelier, c’est par ici.
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
©Kyoko Nishimoto/BUAISOU
LES PLUS POPULAIRES
-
La subtilité de l'art japonais du papier exposée à Londres
En 2018, quinze créateurs contemporains ont eu carte blanche à la Japan House pour exprimer leur art au moyen de papier “washi” traditionnel.
-
Les nuits électriques de Tokyo sublimées par Liam Wong
Dans la série “TO:KY:OO”, le photographe capture la capitale à la nuit tombée, lorsque les néons créent une ambiance cinématographique.
-
Recette vegan de pot-au-feu japonais par Lina et Setsuko Kurata
Le “oden” est un plat typique de l’hiver, que l’on peut préparer chez soi mais que l’on trouve aussi en vente en supermarché dans l'archipel.
-
La quintessence de la beauté du Japon retranscrite par Erin Nicholls
L'artiste australienne saisit avec acuité les scènes et détails les plus insignifiants du quotidien qui semblent soudain prendre vie.
-
Adrien Jean, immersion dans une culture solitaire
Dans cette série, le photographe questionne le sentiment de solitude, des Japonais mais aussi des voyageurs qui visitent l’archipel.